Pourquoi il faut recréer le ministère de la Mer

Le Télégramme - 1 juillet 2020
[…] À l’occasion du remaniement, revient en force l’idée de disposer à nouveau d’un ministère centralisant les responsabilités sur les affaires maritimes.
Emmanuel Macron a précisé le 14 juin, que cela inclurait une "accélération de la stratégie maritime". Une conviction du locataire de l’Élysée qui s’est forgée une première fois, le 3 décembre dernier, avec un long discours prononcé lors des Assises de l’économie maritime. "Le XXIe siècle sera maritime, y avait-il déclaré. C’est par la mer que nous aurons à repenser notre alimentation, mais aussi les équilibres de notre planète". Une place centrale accordée aux enjeux maritimes donc, qui donne une forte légitimité à recréer un ministère de la Mer.
Le meilleur argument en faveur d’un ministère de la Mer reste l’éparpillement des structures administratives : le Secrétariat général de la mer, les directions du ministère de la Transition écologique, celles du ministère de l’Agriculture… sans oublier le ministère des Outre-Mer. Placer ces entités sous une tutelle unique permettrait assurément un pilotage plus efficace. Elle serait aussi plus écoutée à Bercy.
Quant à la pêche française, elle manque aujourd’hui d’un porte-voix unique devant les instances de l’UE pour gagner les arbitrages sur les quotas, les soutiens aux ports et, en particulier depuis le Brexit, sur les zones de pêche.
Par ailleurs, l’économie maritime mondiale va doubler d’ici 2030. Elle représente en France 350 000 emplois directs et 90 milliards d’euros de revenus, hors tourisme. "La France doit se mettre en ordre de marche pour être en capacité d’être au rendez-vous de 2030, souligne Frédéric Moncany de Saint-Aignan, Président de l’École Nationale Supérieure Maritime. La France des atouts et des acteurs pour répondre présente, mais à condition d’avoir la bonne organisation et les bons moyens".
Cette voie bleue de progrès doit s’allier avec une ambition écologique renouvelée : préserver les ressources halieutiques, mais aussi la biodiversité des écosystèmes marins et la recherche scientifique, ainsi que le développement des énergies renouvelables. Une clarification des responsabilités s’avérerait nécessaire. "L’implantation d’un parc éolien empiète sur les zones de pêche, comme c’est le cas dans la baie de Saint-Brieuc : il y a là un conflit d’usage du domaine public qui fait l’objet d’un affrontement entre des autorités aux objectifs différents, remarque Alain Cadec. Un ministère de la Mer permettrait de coordonner la politique de l’État dans toutes ces dimensions".