PORTUAIRE - Du porte-conteneurs du Havre au vélo à Paris, le numérique révolutionne le transport de marchandises
Ouest-France – 5 octobre 2025
[…] La transformation numérique du transport maritime et logistique entre Le Havre, Rouen et Paris entre dans une nouvelle phase. Sous l'impulsion du réseau Haropa Port, la France participe à la création de corridors numériques destinés à fluidifier le transport des marchandises, de la mer jusqu'au dernier kilomètre urbain.
L'idée, explique Jérôme Besancenot, directeur du projet Transition numérique à Haropa Port et fondateur de la start-up Easyport, est simple : « Imaginez ce que représente un navire de 20 000 conteneurs en termes de données. Pour l'amener au bon quai, il faut savoir ce qu'il transporte ». Depuis les années 1980, la dématérialisation a simplifié la paperasserie portuaire. Mais la révolution actuelle consiste à anticiper plutôt qu'à simplement accélérer les flux.
« Faire plus vite n'a pas toujours de sens. Une baisse de 10 % de la vitesse, c'est 20 % de carburant en moins ». La priorité devient donc la décarbonation grâce à une gestion plus intelligente des arrivées et des escales. Trop souvent, « les navires attendent des heures à l'entrée des ports », générant du CO2 inutilement. Pour y remédier, Haropa collabore avec Singapour et Rotterdam, sous l'égide de l'Organisation maritime internationale (OMI), sur le concept du « Just in Time Sailing », ou navigation en juste à temps.
Ce système repose sur un partage accru des données entre tous les acteurs : armateurs, autorités portuaires, logisticiens, mais aussi transporteurs routiers et fluviaux. « Un conteneur passe entre les mains d'une trentaine d'acteurs ». Mieux les informations circulent, plus les chaînes logistiques gagnent en précision et en sobriété. Ce suivi s'étend jusqu'à Paris, où les derniers kilomètres peuvent être assurés à vélo, pour une logistique urbaine bas-carbone.
L'intelligence artificielle (IA) joue un rôle clé dans cette mutation : elle permet de réduire les marges d'incertitude sur les arrivées de navires, « de dix heures à une ou deux heures ». Mais elle amène aussi de nouveaux risques cyber, souligne Besancenot : « Elle est aussi utilisée par les cyberterroristes ; nous devons nous en servir pour nous défendre ».
Avec ces innovations, Haropa Port ambitionne de faire de l'axe Seine un modèle européen de logistique connectée, durable et intermodale, du porte-conteneurs havrais au vélo parisien.