La Normandie au coeur de la filière éolienne offshore

Le Journal du Grand Paris - 7 décembre 2021
[…] Sur les huit parcs éoliens offshore français qui doivent entrer en fonctionnement d'ici à 2028, la moitié sera située au large des côtes normandes.
Le 26 avril dernier, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili confirmait l'ouverture d'une phase dite de « dialogue concurrentiel », concernant le huitième parc éolien en mer au large des côtes françaises. Un parc localisé au large de Barfleur et des côtes du Cotentin, doté d'une puissance de 1 000 MW et qui attire la convoitise des grands noms de l'industrie des énergies renouvelables : EDF renouvelables, Iberdrola, Ocean Winds (entreprise commune de Engie et EDPR), le Néerlandais Shell, TotalEnergies ainsi que le consortium composé de Vattenfall, Wpd et de la Banque des territoires.
Sans attendre la désignation du lauréat, qui doit intervenir courant 2022, la filière s'est mise en ordre de marche avec notamment, au Havre, la construction par Siemens Gamesa renewable d'une usine de production de pales et de nacelles qui pourrait, à terme, employer quelque 750 personnes. Situé en plein cœur de la zone portuaire, le complexe unique en Europe est d'ores et déjà en lice pour fournir les parcs de Fécamp, Courseulles-sur-Mer et Saint-Brieuc, soit au total près de 200 éoliennes. S'agissant des parcs de Yeu-Noirmoutier (Loire-Atlantique) et Dieppe-Le Tréport (Seine-Maritime), l'engagement de Siemens Gamesa reste, pour l'heure, suspendu aux procédures en cours et aux décisions des industriels lauréats des appels d'offres.
D'ici à deux ans, donc, les deux premiers parcs offshore normands de Courseulles-sur-Mer et Fécamp devraient entrer en production. Une échéance plus si lointaine pour des projets qui, rappelons-le, sont issus d'un appel d'offres lancé par l'Etat… en 2011 ! Dans le Calvados, le consortium réunissant EDF renouvelables, WPD et Enbridge prévoit un investissement total de 1,8 milliard d'euros pour l'installation de 64 éoliennes affichant une puissance cumulée de près de 500 MW. Plus au nord, au large de la côte d'Albâtre, le même opérateur doit installer 71 unités dont la production envisagée (500 MW) équivaut à la consommation domestique en électricité d'environ 770 000 personnes, soit 60 % des habitants de la Seine-Maritime.
Sur le même thème : Où en est le projet de parc éolien en mer entre Dieppe et le Tréport ?
ParisNormandie - 30 novembre 2021
[…] Calendrier du projet, état des recours juridiques, indemnisation des pêcheurs, Thibaud Grandsire, responsable des relations locales d'Éoliennes en mer Dieppe-Le Tréport (EMDT), répond aux questions de Paris-Normandie sur l'actualité du parc.
Où en sont d'un point de vue juridique les recours engagés par les opposants au parc ?
Ces recours ne sont toujours pas purgés. Le tribunal administratif de Nantes et la cour administrative d'appel ont rendu des décisions rejetant les recours des opposants. L'affaire est à présent devant le Conseil d'état. Nous espérons que cet épisode juridique sera clos courant 2022.
Comment gérez-vous la question des indemnisations pour les pêcheurs ?
Nous discutons avec les comités des pêches, via une médiation menée par l'ancien directeur du port de Lorient, Maurice Benoisch, une personnalité qui fait consensus. Cette médiation a pour objectif de renouer le dialogue et de travailler sur les schémas de compensation. L'idée, c'est que toute perte de chiffre d'affaires avérée doit être compensée. Une étude a été confiée à un regroupement d'experts de la filière pêche, le Ricep, qui doit obtenir les données économiques, mais aussi de géolocalisation, pour savoir qui pêche et où. Le chiffrage des compensations doit être ajusté d'ici l'été 2022. En 2018, un premier chiffrage avait évalué à 3,9 M € l'enveloppe des indemnités pendant la période de construction, sachant que pendant l'exploitation, le parc sera pêchant.
L'étude doit aussi déterminer l'impact du parc sur l'activité des ports de Dieppe et du Tréport. Combien de pêcheurs sont concernés ?
L'enjeu de l'étude, c'est de le déterminer, car c'est l'un des points sur lequel tout le monde n'est pas d'accord : combien de pêcheurs ont une activité sur zone, quel est leur degré de dépendance à cette zone en terme économique… C'est un sujet très délicat.
Quel est le calendrier des travaux ?
Nous en sommes à la phase de préparation à l'installation et à la construction. Un premier travail environnemental a été lancé, qui consiste à réaliser la photographie la plus précise possible de l'environnement avant construction : qualité de l'eau, état des sédiments, des ressources halieutiques… Ça va commencer ce mois-ci, les études sur site vont durer jusqu'en avril 2023. Pendant un an et demi, il n'y aura pas de travaux, mais des prélèvements, des études… La construction des 62 éoliennes devrait être lancée courant 2024, pour un début d'exploitation fin 2025, voire 2026.
Et concernant les travaux eux-mêmes ?
Nous travaillons à identifier les entreprises de rang 1 et à contractualiser avec elles, ce sont celles qui vont installer les composants majeurs du parc : câble, fondation… Ce sont des appels d'offres européens. On parle de plate-forme en mer, avec des navires assez rares, que l'on trouve plutôt en Europe du Nord. Les lauréats seront connus mi-2022.
Quelles pourraient être les retombées pour les entreprises locales ?
Des entreprises locales interviendront en sous-traitance, les bateaux auront par exemple besoin de ravitaillement, de pièces pour leur maintenance, on aura aussi besoin d'entreprises qui interviendront sur la construction de la base de maintenance, il faudra alors des architectes, des spécialistes du BTP, des électriciens…
La base de maintenance sera-t-elle construite avant ou après le lancement du chantier du parc ?
C'est un élément technique qui n'est pas encore tranché aujourd'hui. Cette base pourrait aussi servir pendant la construction du parc, comme base de vie, car il faudra un lieu proche du chantier pour faire la coordination des opérations en mer, avec des modules préfabriqués. Ça fait partie des éléments techniques qui sont en cours d'analyse. Les bâtiments en dur resteront pendant toute la durée d'exploitation du parc, avec des pontons pour les navires des équipages de maintenance.
Sur le même thème : Il a compris avant les autres : Iberdrola, le champion espagnol de l'éolien
L'express - L'expansion - 28 décembre 2021
[…] Donné pour mort au tournant des années 2000, l'électricien espagnol s'est converti en géant mondial de l'éolien et du solaire.
Iberdrola est le champion mondial de l'électricité éolienne. C'est ce géant espagnol qui a investi la bagatelle de 2,4 milliards d'euros en baie de Saint-Brieuc pour construire, à 16 kilomètres des côtes, un parc de turbines de 62 moulins offshore qui seront capables de produire, à partir de 2023, l'équivalent des besoins d'une ville européenne de 835 000 habitants.
L'opérateur ibérique s'est fait un nom dans le domaine des énergies renouvelables depuis que l'ingénieur de Salamanque, Ignacio Galan, a pris en main cette firme, jusqu'alors vieillotte, pour en faire une enseigne verte. Avec une longueur d'avance sur ses compatriotes Endesa et Naturgy (l'ancien Gas Natural) mais aussi sur des concurrents comme EDF et Engie.
Ignacio Galan a pris les rênes d'Iberdrola au début des années 2000 en ayant le pressentiment, avant les autres, que c'en était fini du charbon. A l'époque, Iberdrola ne figurait qu'au vingtième rang des énergéticiens mondiaux. Il était pratiquement donné pour mort. Né du rapprochement il y aura bientôt trente ans du basque Iberduero, et du madrilène Hidroeléctrica Española, le groupe ne disposait que de barrages, de centrales thermiques et de participations dans six réacteurs nucléaires. Il est aujourd'hui le n° 1 mondial de l'éolien et l'un des plus grands producteurs d'énergie solaire et hydraulique. En 2000, les énergies propres représentaient dans son portefeuille 9 gigawatts de capacité installée. Aujourd'hui, elles dépassent 35 gigawatts, les deux tiers de ses actifs (55 gigawatts au total).
Entre-temps, l'espagnol a multiplié ses effectifs par 3, à 37 000 salariés, et son chiffre d'affaires par plus de 4, à 33 milliards d'euros. Il représente actuellement l'une des plus grosses capitalisations boursières européennes du secteur de l'énergie (62 milliards d'euros) : il vaut le double d'Engie (32 milliards), 1,5 fois EDF (39 milliards), et talonne désormais l'italien Enel, leader sur le Vieux Continent (67 milliards).
Au cours des deux dernières décennies, Iberdrola a changé d'échelle, en mobilisant 120 milliards d'euros. Et ce n'est pas terminé. Le conquistador entend investir 150 milliards supplémentaires dans les dix ans qui viennent, afin de tripler sa présence dans les énergies propres et de doubler l'étendue de ses réseaux de distribution. Iberdrola est l'un des six candidats positionné sur l'appel d'offre n°4 au large de la Péninsule du Cotentin.