Jean Brossollet, directeur général de la société Ecomer Data, et ancien président de Normandie Maritime : "les atouts et les perspectives de la Normandie maritime sont enthousiasmants"

Actuellement directeur général de l'entreprise Ecomer Data après avoir été gérant des sociétés d'assurances Seasecure et Guian, Jean Brossollet explique son changement de cap professionnel.

Normandie Maritime : quelles sont les activités d'Ecomer Data ?

Jean Brossollet : "La raison d’être d'Ecomer Data est d’accompagner la transformation des métiers du maritime face aux enjeux écologiques et économiques. Dans un contexte de décarbonation, l ’autonomisation et de digitalisation, nos solutions exploitent les données des navires pour simplifier les relations entre les acteurs du maritime. Nous avons l’ambition de déployer nos solutions de collecte et d’analyse de données et de développer des applications qui permettront d’améliorer l’efficience opérationnelle sur tout le cycle de vie des navires, à commencer par l’amélioration de leur efficience énergétique".

"Une opération a permis de sécuriser les emplois en région"

NM : Pourquoi avoir quitté le monde des assurances ?

JB : "C’est une conjonction de raisons toutes positives. En octobre 2022, j’ai cédé mes activités de courtage d’assurance maritime à Howden, courtier européen en fort développement, qui apportait à mes sociétés des moyens financiers et un environnement dynamique. Ces éléments permettront de déployer l’offre de services en assurances maritimes en lien avec d’autres branches d’assurances, pertinentes pour nos clients. Cette opération a permis de sécuriser les emplois en région – en particulier au Havre - dans un environnement très concurrentiel".

NM : Des opportunités se sont-elles présentées ?

JB : "L’année précédente, avec Geoffroy Lacoin, nous avions racheté la société Marinelec, spécialiste des systèmes électroniques de sécurité pour les navires. Depuis 10 ans, Marinelec déployait un économètre sur les navires de pêche et de service. Nous avons souhaité aller plus loin en étendant notre proposition de valeur de l’acquisition des données énergétiques à bord à l’analyse de ces données et au développement d’applications pour les armateurs et opérateurs des navires. Sans oublier les outils d’aide à l’écoconduite à bord avec reconnaissance automatiques de phases afin de tenir compte des contraintes opérationnelles des navires. Ce développement était une belle opportunité pour moi de me mettre à nouveau au service de l’industrie maritime, en proposant une solution technique qui répond aux enjeux majeurs d’efficience énergétique et opérationnelle des navires. C’est une belle aventure d’entreprise, dans un environnement maritime passionnant, qui m’invite à découvrir des aspects plus techniques et à évoluer dans le monde de l’innovation que je ne connaissais pas".

"L’investissement de chacun des acteurs publics et privés de l’économie maritime à l’échelle du territoire normand est indispensable pour faire avancer l’intérêt collectif de la filière"

NM : Quels enseignements avez-vous pu tirer de votre mandat de président de Normandie Maritime ?

JB : "De l’importance de l’écosystème. L’investissement de chacun des acteurs publics et privés de l’économie maritime à l’échelle du territoire normand, et plus largement en France, est indispensable pour faire avancer l’intérêt collectif de la filière. C’est cet investissement qui transcende la logique de compétition normale entre sociétés commerciales, et qui a permis par exemple le travail sur le contenu local autour des grands marchés EMR, dont les enjeux pour l’emploi de nos régions et le développement de nos sociétés est tout à fait majeur. C’est l’occasion pour moi de saluer l’implication des membres de Normandie Maritime, autour d’une équipe qui ne compte pas ses efforts et menée avec talent par notre déléguée générale Delphine Lefrançois".

NM : Quel regard portez-vous sur l'écosystème maritime normand et havrais ?

JB : "Nous répétons souvent que la Normandie est une grande région maritime qui s’ignore. Ces années d’entreprise au Havre et mon mandat de président de Normandie Maritime m’amènent à relativiser cette idée. Dans un territoire qui s’étend des places de Dieppe, sans oublier le Tréport, à Cherbourg, qui comprend à la fois des ports « secondaires » et les infrastructures de l’axe Seine, qui compte des acteurs privés de premier plan, souvent aussi efficaces que discrets, qui participe activement à l’implantation et au développement des EMR, qui se positionne comme une région de référence sur les sujets de la décarbonation et du mixte énergétique de demain, les atouts et les perspectives de la Normandie maritime sont enthousiasmants. Les acteurs publics et privés normands ont conscience de ces atouts et s’engagent pour les valoriser. Une difficulté, me semble-t-il, tient à notre capacité à créer du lien entre « les Normandies maritimes », pour valoriser ces atouts de manière mieux coordonnée et plus efficace. N’est-ce pas là justement une des missions de Normandie Maritime ?"

"Nos deux grandes régions maritimes ont à gagner à travailler de concert plutôt qu’à se comparer"

NM : D'après vous, qu'est-ce que la Normandie a à envier à la Bretagne et inversement ?

JB : "Pour essayer de répondre à ce jeu risqué des comparaisons, je dirais que la Normandie a les infrastructures et l’accès à l’un des principaux marchés européens par l’axe Seine, là où la Bretagne a une culture maritime peut-être plus développée, et un peu d’avance dans la valorisation collective de ses atouts. Cela étant dit, Ecomer Data et le Groupe Marinelec ayant un pied dans chaque région, nous avons l’intention de nous investir dans les deux écosystèmes. Nos deux grandes régions maritimes ont à gagner à travailler de concert plutôt qu’à se comparer. Les liens sont d’ailleurs déjà nombreux, y compris entre les équipes des cluster Normandie Maritime et Bretagne Pôle Naval".