Il fut un temps où la navigation en solitaire était le summum de la pratique nautique. Alors OK, respect aux skippers du Vendée Globe, qui surfent à 30 neouds au milieu des icebergs dans les 50èmes rugissants au milieu de nulle part, si loin de tout qu'aucun secours ne peut les atteindre en moins de 24H. Oui mais voilà, la pratique d'aujourd'hui se décline en équipage et en flottille.
Imaginez 50 bateaux qui partent de Cherbourg, sans aucun objectif de performance, juste pour le plaisir d'être ensemble, telle une meute de loups à la poursuite d'un lapin perdu dans l'immensité d'une steppe désertique. Le premier arrivé à Aurigny gagne... le kiffe de sortir avant tout le monde les bouteilles de blanc, le saucisson et les rillettes de la mer dans le carré du bateau transformé en bar à tapas.
Le dernier gagne.. l'estime de tous ! Il a réussi à vaincre le redouté Raz Blanchard, qu'il n'aurait jamais osé affronté seul sur son petit 8 mètres millésimé année 80. Et en plus, il navigue avec sa femme. J'en connais plus d'une qui a renoncé à jamais aux "joies" de la plaisance, après s'être fait la peur de sa vie au large du Cap Levi, avec mer contre courant.
Arrivés à Aurigny, pardon, Alderney, à quelques milles de Cherbourg, on est plus en France. Et on commande une ale au Harbor Lights, le pub du port de Bray, sorry Braye Harbour. On se raconte ses aventures, on se gausse de celui qui a dégeulé son petit déj, ou de cet autre qui n'a pas bien calculé la vitesse du courant et s'est presque retrouvé à Dielette ! Mais la sécurité affrétée par les organisateurs a bien fait son taf et rattrapé le coup. Le gars qui a dégeulé son petit dej, et celui qui a raté l'entrée du port sont là ce soir pour déguster le meilleur fish & chips de leur vie, parmi les 200 navigateurs amateurs qui sont là comme à la kermesse du dimanche à la Muguette. On a même des Parisiens sympas (si, si) à la table à côté, et des Bretons du Léon, venus rendre visite à leurs cousins (Grand Bretons).
Le lendemain, au retour vers Cherbourg, personne ne se tire la bourre mais bizarrement, tout le monde envoie le spinnaker. Faut dire qu'à l'arrivée, on a encore le ti punch qui passe bien sur la terrasse de l'équipage, le bar où tout le monde se retrouve en fin de weekend pour se congratuler.
Au final, au veut quoi ? Bouffer des milles ou partager des expériences, des anecdotes, être ensemble. Les deux en fait. Mais juste qu'on pourrait pas, tout seul. Alors l'avenir de la plaisance, c'est la Fish & Ships, cet esprit qui permet à tous de se dépasser sans se mettre en danger, de manger un fish & chips et de trouver ça bon ! On est sur la même longueur d'onde, le même canal VHF, on est connectés au même réseau. Le marin 4.0.
inscriptions : yc-cherbourg@wanadoo.fr